Le label « sustainable » de Nouvelle-Zélande :

Publié le par julie & jacques

 

La Nouvelle-Zélande a la cote chez les amateurs de « nature ». On ne sait pas d’où ça vient, mais le pays a la réputation d’être « en avance sur l’écologie », notamment pour le vin. Sur place, la « sustainabilité »* est en effet très répandue chez les vignerons, gros ou petits. Mais ça ne veut pas forcément dire grand chose, si ce n’est que, comme ailleurs, les lobbys/gouvernements/industriels ont compris que le vert était très tendance.

En arrivant dans les domaines néo-zélandais, la première chose que l’on observe, ce sont les panonceaux « sustainable », à l’entrée. Jusqu’alors, nous traduisions ce mot par « équitable », comme dans « commerce équitable ». Après quelques questions posées aux vendeurs dans les caves, nous avons commencé à traduire le mot plutôt par « raisonné », comme dans « agriculture raisonnée ». Cette dernière préconise un usage modéré, limité à « l’indispensable », de tout produit potentiellement toxique, et se veut un pas vers l’agriculture biologique, ou une version modérée de cette dernière.
Finalement, on se dit que la version néo-zélandaise est un mélange des deux

L’invention néo-zélandaise : le label à points

Ce label « sustainable » est délivré par la NWNZ (National Wines of New Zealand) et fonctionne, nous a-t-on expliqué, « par points ». Chaque action dans le vignoble enlève ou donne des points selon qu’il est conforme ou non aux principes « sustainable ». Exemple : le ramassage à la main, c’est bien, le pesticide, c’est mal. On schématise, mais bon, vous aurez compris le principe. La NWNZ fait la moyenne, et délivre le label, ou pas.

Jusque là, tout va bien… Sauf que tout dépend de ce qu’on définit comme « conforme aux principes sustainable ». Ainsi, le vigneron de Tiwaiwaka nous explique avec ironie que, selon ce principe, « on peut très bien sprayer 15 jours avant les vendanges, et toujours avoir le label », il suffit de faire autre chose en échange, pour toujours avoir la moyenne. Et ce quelque chose peut être aussi éloigné de la gestion du raisin que… utiliser du papier recyclé pour les étiquettes (« ou dans les toilettes du staff », ricane le Raisin).

Apparemment, le label sustainable définit non pas une certaine pratique de la viticulture, ce qui serait traduisible par « raisonné », mais toute une façon de faire du business. De façon équitable, donc, c’est-à-dire respectueuse à la fois de l’environnement, des gens qui travaillent dans l’entreprise, et d’une certaine « culture » du vin.

On comprend mieux dès lors pourquoi la plupart des vignerons rencontrés ont souligné à quel point la procédure pour obtenir le label était longue et fastidieuse. « Ils regardent tout dans le détail, même des choses assez surprenantes, comme votre politique salariale… Il faut rendre des comptes sur tout », a ainsi expliqué la vigneronne du domaine Big Sky (Martinborough).

Pour le Raisin, toujours subtil dans ses jugements, « c’est comme la viticulture raisonnée, ça ne veut rien dire ».  Il est vrai que, pour le consommateur, le label reste un indicateur très peu fiable quant au caractère écologique et équitable du domaine, sans parler de la qualité du vin…

Visite au domaine « le plus sustainable du monde »

Notre visite du domaine Peter Yealands, 1000ha plantés en 2007 (Marlborough), en est l’illustration parfaite. Le propriétaire a proclamé à l’ouverture du site qu’il s’agirait ni plus ni moins du « domaine le plus sustainable du monde ».
Sur place, on s’est rendu compte qu’en terme d’innovations, il s’agissait de panneaux solaires sur la cave (le domaine est « presque auto-suffisant en énergie), de recyclage des déchets, de récupération des eaux usées, etc. Ce qui est très louable, et même admirable, et mérite, éventuellement, d’être valorisé à travers une reconnaissance officielle, comme un label.

Mais dans les vignes ? Et bien, c’est toujours les techniques conventionnelles de viticulture qui prévalent : pesticides, herbicides et compagnie, ramassage machine, etc . Dans la cave, même chose : « on utilise tout ce qu’il faut pour le vin», notamment des levures exogènes. Mais comme il a plein de « points d’avance », le domaine Yealands reste « sustainable », et même un modèle du genre.

Le pire, c’est que tout le monde semble trouver ça normal. Finalement, on doit être les seuls gogos à avoir cru que « sustainable », ça avait un rapport avec le vin qu’on buvait. Quoique… Je ne suis pas sûre que le consommateur, néo-zélandais ou français, sache faire la différence entre « sustainable », « équitable », « raisonné », « bio », et même, pourquoi pas, « végétarien ».

La dernière chose à savoir, c’est que le label sustainable est… obligatoire. Voilà un détail important, me direz-vous ! Certes. A partir de 2011, le label sera obligatoire pour tout domaine qui souhaite participer « aux concours et à toutes les opérations de promotion officielle ». Quand on sait à quel point certains adorent collectionner les gommettes en or sur leurs bouteilles…

Mais encore une fois, quand on sait ce que le label représenté réellement, on se dit que l’impact de cette obligation ne sera ni sur la qualité du vin néo-zélandais, ni sur la préservation du vignoble, mais plutôt sur l’image du vin néo-zélandais

Sauf si… on est optimiste et on se dit qu’il s’agit après tout d’un premier effort assez louable. Après tout, qui sait ce qui est le mieux : des règles « bio » draconiennes qu’une poignée de passionnés extrémistes seulement peuvent suivre, ou un cadre plus souple qui permet à la majorité d’améliorer, même légèrement, ses techniques, et ainsi au pays tout entier d’évoluer vers une agriculture plus verte ? Rendez-vous dans quelques années…


* « sustainabilité » est un mot que j’ai inventé, que les adorateurs du Petit Larousse me pardonnent.

 

Publié dans Nouvelle Zélande

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J
<br /> Salut jacques, c'est julien de la cave du sommelier. je pars pour la nz le 3 decembre, j'ai donc fait qques recherche moi aussi sur des vins nz qui pourrait etre sympa j'ai juste vu leurs sites qui<br /> me paraissent interessant. Le premier Pyramid Valley vineyard sur North Canterbury et le deuxieme Seresin estate vers Marlborough. Biodynamie levures indigenes a voir et surtout a gouter. Bon<br /> sejour je te dis si j'en ai d'autres. votre au blog est vraiment tres sympa. @+ julien<br /> <br /> <br />
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J
<br /> <br /> Salut Julien,<br /> <br /> Peux tu m'envoyer ton mail et je t'enverrai un listing entier sur les vignerons<br /> biody de la NZ.<br /> Je peux t en envoyer  un sur l 'Australie aussi<br /> <br /> Jacques <br /> <br /> <br /> <br />